Lettre de remerciement
Bonjour
cher ami,
Je te remercie infiniment pour le livre que tu m’as offert à Noël. J’ai dévoré en une soirée Un dîner avec Darwin. Jusqu’ici, l’inspiration me faisait défaut pour le cours que je veux donner l’automne prochain aux étudiants de l’Université du Troisième Âge. Et voilà que j’ai trouvé dans cette bible non seulement le sujet, mais aussi une pléthore d’informations pour élaborer un cours sur l’évolution de notre alimentation depuis la conquête du feu par Homo erectus.
Tu sais à quel point je deviens extatique quand je me plonge dans la préparation d’un nouveau cours. J’ai soigneusement relu le livre pour articuler mon syllabus, puis j’ai récolté sur Internet les toutes dernières découvertes sur la culture des légumes au Pérou au Néolithique, l’apparition il y a 8000 ans du blé tendre dans le Croissant fertile, etc. J’ai été fasciné d’apprendre que l’Homme a d’abord utilisé la levure pour faire de la bière avant de l’utiliser pour faire lever le pain.
Je suis maintenant impatient de me retrouver devant ma classe pour raconter tout ça, plus l’invention du yogourt et quelques autres. Je vais débuter en parlant de notre alimentation : ainsi, les étudiants seront en territoire familier. Ensuite, je les amènerai à comprendre pourquoi nous mangeons tel ou tel aliment, cuit de telle ou telle façon. Je leur parlerai des papilles gustatives de l’umami qui nous permettent d’apprécier le goût de la viande et dont l’existence a été confirmée il y a moins de vingt ans seulement. Je leur expliquerai aussi comment les épices titillent notre palais via des cellules tactiles très particulières.
J’imagine déjà les questions de mes étudiants : avec délectation, je feindrai l’ignorance pour que chacun trouve la réponse pendant la semaine puis partage son résultat au début de la séance suivante. Je me vois déjà « potiner » scientifiquement, raconter des anecdotes amusantes ou étonnantes, par exemple sur l’ornithorynque et notre pseudogène du vitellin. Les moments que je passe à préparer mes cours et à imaginer les réactions des étudiants me plongent dans une fébrilité heureuse et un ravissement d’anticipation.
Je m’attends d’ailleurs à retrouver plusieurs de mes étudiants habituels. Je pense notamment à cet ancien juge qui lit mes notes avant chaque séance, à cet ébéniste qui, pour le plus grand bénéfice de tous, n’hésite pas à m’interrompre quand il ne comprend pas, et surtout, à cette dame très digne de 85 ans qui me suit pour pouvoir discuter de science avec ses petits-enfants. Je ressens un réel bonheur quand je la vois entrer à petits pas dans le local, son cartable sous le bras comme une écolière. Je me dis que je ne pouvais trouver œuvre plus utile à accomplir à ma retraite que d’enseigner aux aînés.
Ah
oui ! J’allais oublier de te donner le titre de ce nouveau cours : L’animal
qui cuisine. Tu aimes ? S’il t’intéresse, je te rappelle que les
inscriptions débutent le 21 août prochain.
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