L'Atlantide
Elle est assise dans l'unique fauteuil de la pièce. Ses yeux humides fixent un monde confus au-delà de la fenêtre, un monde de silence dont elle ne parle plus. Elle a tellement maigri qu'elle semble flotter dans son antique robe turquoise, celle-là même qui, jadis, lui donnait si fière allure. Le tissu avachi dissimule une peau désormais flasque, ainsi que l’épaisse couche-culotte qu'on lui met chaque matin avant de la conduire à son fauteuil. Parfois, elle lève lentement les yeux vers le ciel comme si elle suivait des bulles de savon irisées ou qu’elle regardait ses souvenirs la quitter un à un. Parfois aussi, elle glisse ses mains le long des bras froids du fauteuil en faux cuir et laisse s’échapper un long soupir. Sur quoi ? Sur sa vie passée ? Sur ce mouroir ? Sur le temps qui se traîne ici comme une couronne du Christ sur le corail australien ? Je me suis mis à frissonner en pensant que c’était ça la vieillesse,