Helena

 Helena aurait aimé avoir des enfants, elle les adorait.

Mais, aucun homme n’avait voulu d’elle.

Impossible de s’entendre avec elle, s’étaient plaints certains.

Sa compagnie ne procure aucun plaisir, avaient rajouté d’autres.

Quoiqu’il en fut réellement, tous s’entendaient pour dire qu’elle avait l’esprit dérangé.

Personne ne venait donc lui parler, pas même les enfants ou monsieur le curé.

Helena vieillissait seule, remplie d’amertume envers les gens de son village.

Elle passait des journées entières près du puits à espérer l’arrivée d’un étranger qui n’aurait jamais entendu de ragots à son sujet.

Là, assise sur un tabouret de traite, elle peignait continuellement son abondante chevelure avec un démêloir d’ivoire à dents longues et larges.

Hélas, d’étranger il ne vint jamais !

À la longue, Helena n’en put plus d’attendre.

Elle mit le feu à sa chaumière.

Les villageois lui prêtèrent alors quelque attention.

Trop tard, malheureusement !

Ce jour-là, Helena perdit non seulement sa maison, mais aussi le peu de raison qui lui restait.

Elle alla chercher refuge dans la forêt et n’en revint jamais.

Les vieux du village racontent que Helena est devenue une Wili : elle erre la nuit dans les bois, vêtue d’une robe blanche diaphane, à la recherche d’un homme à marier. Sur un ton impératif, ils enjoignent à leurs fils et aux fils de leurs fils :

« Jeunes hommes, n’entrez jamais, au grand jamais, dans la forêt la nuit tombée, car alors Helena vous attrapera. Elle vous obligera à l’épouser et vous vivrez sans postérité, malheureux pour l’éternité. »

Le feu au village. Paula Iacob


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