Un accueil incroyable
Me
voici de retour à Cône Orange ce matin. Pour la première fois, j’ai
rendez-vous avec mon urologue dans le nouveau CHUM. Certes, la construction
n’est pas terminée (je vois plusieurs casques jaunes fumer sur le trottoir),
mais l’hôpital est fonctionnel. Après trente minutes d’attente sur la rue
Saint-Denis, j’entre enfin dans le stationnement.
Cherchez
les petites lumières vertes au plafond,
dit la pancarte à l’entrée, elles vous indiquent les places disponibles.
Ça y est, me voilà daltonien : je ne vois que du rouge. Je décide de
suivre le cortège automobile et finalement, au septième sous-sol (à ne pas
confondre avec le ciel du même nom), je trouve une place entre un mur et une
colonne de béton. Un très bon spot, que je me dis en prenant une photo
des lieux pour me rappeler où j’ai garé mon auto.
J’emprunte
le tapis de peinture rouge qui conduit aux ascenseurs. En chemin, je croise mon
premier employé du CHUM : un homme masqué non pas d’un N95 contre la
COVID, mais d’un magnifique masque à gaz facial, style Dark Vader. Il agite un
monoxyde-de-carbonomètre rouge dans l’air, prend la lecture, puis repart
rapidement vers les ascenseurs. Je le rattrape et le félicite de s’assurer de
la qualité de l’air que nous respirons avant d’entrer à l’hôpital. J’ignore
s’il m’a souri ou même répondu. Il m’a juste pointé les ascenseurs en faisant
signe de me hâter avec son autre main.
L’accueil
au rez-de-chaussée est extraordinaire. Je sens qu’on m’attendait, que tout est
prêt pour ma visite : un premier agent de sécurité m’invite à me
désinfecter les mains, un second à changer de masque, un troisième à me
présenter au comptoir sous l’escalier pour m’identifier et recevoir une carte
jaune qui va m’autoriser à circuler dans l’hôpital. Puis, c’est au tour des
bénévoles, facilement reconnaissables à leur veste bleu royal et leur âge canonique.
La première me demande où je vais (en Urologie), la seconde m’indique le chemin
pour m’y rendre (l’escalier roulant) tandis que la troisième vérifie si j’ai
bien agrafé mon carton jaune (oui).
Deuxième
étage, aile C, Urologie et Gastro-Entérologie. C’est bon. Un bénévole me fait
signe d’avancer et de présenter ma carte d’assurance-maladie à un terminal
informatique. Un petit aparté ici : j’ai de l’assurance-vie, de
l’assurance-habitation et de l’assurance- automobile, pourquoi une
assurance-maladie et non une assurance-santé ? Devrais-je aussi avoir une
assurance-mort et une assurance-accident ? Je ne fais que poser la question…
Le
gentil bénévole m’aide à répondre aux questions du terminal, ce qui lui permet
de tout apprendre sur moi : ma date de naissance, le nom de ma mère, mon
adresse et mon téléphone. Ne lui reste qu’à me demander s’il y a quelqu’un chez
moi présentement. Le terminal imprime un coupon indiquant le nom du médecin que
je dois rencontrer, l’heure et mon numéro dans la file d’attente. Pensez-vous
rester ici longtemps s’enquiert maladroitement le bénévole en couvrant son
cellulaire de la main ? Prudent, je lui réponds non, certainement pas plus de
30 minutes, puis lui demande où se trouve la salle d’attente. Tout au fond du
couloir, la dernière porte à gauche. Parfait, j’ai quinze minutes d’avance et je
suis déjà rendu à destination.
Arrivé
au bout du couloir, vraiment au bout, une porte en contreplaqué blanc avec une
affiche portant un seul mot : Veolia. J’entends de l’autre côté de la
porte des coups de marteau et une scie électrique. Je me demande si c’est
vraiment une bonne idée que je me fasse enlever la prostate. Je tire sur la
poignée et, après un bref moment, la serrure se déclenche et me laisse entrer.
Aussitôt, le bruit se fait assourdissant. Non, c’est impossible, ce n’est pas
l’Urologie, ça doit plutôt être la Gastro-entérologie. J’ai à peine fait
quelques pas qu’un sympathique bénévole portant un casque jaune me demande
gentiment « Eille Menne, ouské ton casque ? ». « Je vous jure
monsieur qu’on ne m’a pas dit qu’il fallait un casque jaune en Urologie, mais
voyez, j’ai la carte jaune ». Le casque jaune comprend ma méprise et
entreprend de m’aider : « Vous êtes entré par une sortie d’urgence
monsieur. Ici c’est un chantier de construction ». Comme je m’apprête à
retourner sur mes pas, il me ré-aide : « Vous ne pouvez pas sortir
par cette sortie monsieur. Descendez l’escalier de bois et au rez-de-chaussée,
vous verrez l’entrée par où sortir ». Je le remercie et entreprend de
descendre ledit escalier dans la pénombre en tenant fermement la main courante
en deux par quatre d’épinette.
L’ouvrier
m’a aidé de son mieux, et loin de moi l’idée de le blâmer ici. Il ne pouvait
pas savoir que le menuisier n’avait pu terminer l’escalier avant sa pause-santé
et qu’il manquait les deux dernières marches (ou les deux premières, selon d’où
vous venez). Résultat : je perds pied et l’équilibre, et tombe du haut de
mon orgueil. Conséquence : une cheville mal en point et une douleur
lancinante sur le côté gauche au-dessous du cœur.
Quand
je vous disais que le personnel du CHUM est accueillant et prévenant : ça
ne faisait pas cinq minutes que je criais à tue-tête qu’un casque blanc est
venu s’enquérir de la cause de mes éclats de voix. Quand il a vu qu’il y avait
eu accident sur le chantier, il a aussitôt demandé à deux employés de me
transporter à l’urgence pour que je reçoive tous les soins nécessaires. Ce qui
fut fait le temps de l’écrire.
Même
traitement rapide et efficace à l’urgence. Le contremaître a prévenu
l’urgentologue que l’accident était survenu dans l’hôpital et que la
responsabilité du CHUM était engagée. J’ai donc eu droit à un traitement
royal : d’abord un examen de ma vue, au cas où j’aurais été trop myope
pour remarquer l’absence des marches. Puis, désinfection des plaies, un super
gros pansement blanc et beige pour ma cheville et une tomodensitométrie pour
mon côté gauche (ça ne s’invente pas un mot
de même). Enfin, attente dans une chambre semi-privée (c’est-à-dire seul
dans une pièce sans porte, juste un rideau bleu foncé constellé de blanc). Une
heure plus tard, l’hôpital m’offre le dîner à ses frais.
À 13 h
30 pile, tenez-vous bien, mon urologue vient me visiter dans ma chambre ! Il
m’explique qu’on l’a prévenu de mon accident et qu’il a tenu à toucher ses
honoraires en venant me voir. Il tient aussi à me rassurer : ma prostate,
toute hypertrophiée qu’elle soit, ne nécessite aucune ablation avant plusieurs
années. Enfin, une bonne nouvelle. Tout à coup, je vois l’urgentologue dans le
cadre du rideau bleu qui attend son tour pour me parler. Oh, oh que je me dis,
j’espère que ce n’est pas la mauvaise nouvelle qui suit la bonne. Ma mère m’a
toujours dit que j’étais très intuitif. Elle ne se trompait pas. L’urgentologue
met des gants blancs et m’annonce que ma douleur au flanc gauche provient d’une
côte fracturée laquelle, en s’enfonçant dans mon ventre, a malencontreusement
perforé la rate. Je dois donc être opéré de toute urgence.
Le
personnel se démène aussitôt pour me trouver une chambre en « zone
froide ». Une heure dix plus tard, deux brancardiers m’amènent dans une
belle chambre fleurie où un mari peut dormir sur un grand fauteuil brun en
attendant que son épouse soit prête à accoucher. C’est là que le chirurgien
vient me voir : il m’offre de profiter de l’ouverture de mon ventre pour
faire enlever ma prostate. Je décline poliment son offre en lui expliquant
qu’elle m’est encore très utile. Je le remercie de sa diligence à m’opérer,
tout comme je remercie ici tout le personnel du CHUM pour son accueil
incroyable.
Je ne
peux que chaudement vous recommander, à vous qui êtes malade et qui souffrez,
d’aller au nouveau CHUM. Une seule suggestion : attendez pour ce faire que
les travaux de construction soient terminés. Sinon, pour l’amour du ciel,
évitez l’Urologie!
Source : urologie-hameln.de |
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