Luciole

 


Enfin le solstice d’été ! Luciole n’est pas frileuse mais, aime-t-elle répéter à qui veut bien l’entendre, Mardi Gras que la chaleur tarde à venir au Québec ! À chaque fois, ses sœurs Luciole et Luciole lui répondent avec une pointe d’exaspération dans la voix, que leur mère tenait de sa mère qui le tenait de sa mère, etc., etc., etc., que dans le temps, les Lucioles québécoises devaient attendre au mois d’août pour connaître, comme Marie-Thérèse Fortin et François Arnaud, les Grandes Chaleurs. À chaque fois aussi, le cœur de Luciole se met à battre la chamade à l’évocation du beau François.

Ici, il me faut vous expliquer que, chez les Lucioles, grandes chaleurs riment avec saison des amours, surtout – soyons francs – avec coitus non-interruptus et multiplus. Eh oui ! Vous comprenez mieux maintenant l’impatience de Luciole.

Malheureusement, Luciole a beau tourner ses senseurs visuels vers tous les points épiscopaux, cardinaux et verticaux : pas le moindre frénétique appel de phares de mâles surexcités par des soirées fraîches passées sur Pornhub. Or, pas question pour Luciole de finir vieille fille comme ses tantes qu’elle n’a pas connues et qui ne lui ont laissé ni cousins (Humm…) ni cousines (Bof !).

Luciole irait bien dans le champ voisin où hier soir il lui a semblé entr’apercevoir à travers les arbres de petites lumières pleines de testostérone. Hélas, ses sœurs lui interdisent de s’approcher de ce champ. Trop dangereux pour toi sœurette, disent-elles. Comment ça ? demande Luciole sur un ton où perce l’éternel conflit entre Libido et Raison. Parce que… (les sœurs hésitent). Parce que c’est le champ des sorcières, finit par murmurer tout bas l’aînée de ses 48 sœurs. « Le jour, elles se cachent du soleil dans une grande maison noire. Le crépuscule venu, chacune enfourche son balai et part à la chasse aux jeunes filles innocentes comme toi (Luciole se dit in petto qu’elle est peut-être vierge, mais certainement pas innocente, m’enfin !) Quand elles en attrapent une … Ah, le cœur me manque ma chère petite sœur tant tout cela est d’une cruauté quasi-humaine. D’ailleurs, aucune Luciole n’est revenue nous raconter ce qu’elle avait subi aux mains de ces Gilbert Rozon de la nuit. »

OK, OK je n’irai pas dans ce champ, finit par lâcher Luciole sur un ton qui sous-entend exactement le contraire. « Je vais plutôt aller faire un tour du côté des potentilles jaunes. » Luciole file immédiatement vers lesdits arbustes mais, dès qu’elle se sent hors de vue de ses sœurs-empêcheuses-de-tourner-en-rond (Ah la famille !), elle penche son corps sur la droite et amorce un virage à 90 degrés direction le champ interdit.

 Le spectacle qu’elle découvre en arrivant en bordure du champ est indescriptible. Je sauterai donc cette partie. Sachez seulement que plein de lumières vont et viennent à perte de vue. Certaines sont fixes tandis que d’autres clignotent de couleurs que Luciole ne peut distinguer faute de cônes rétiniens et de cortex visuel appropriés.

Luciole est enivrée par toutes ces lumières. Que dis-je : elle devient super-excitée, maniaque, érotomane, nymphomane. L’ai-je précisé : elle devient obsédée par le sexe. Ne faisant ni une, ni deux, elle fonce tête baissée dans ce harem mâle fourmillant de Jean-François Brault et de Jean-François Pronovost (coudonc, les beaux mâles se prénomment-ils tous François ?). Impossible pour Luciole d’arrêter son choix : toutes les lumières sont belles à ses yeux composés. Un peu plus et on se croirait à Occupation Double, se dit-elle en mouillant son proctodeum.

Ce fut sa dernière pensée. Non, excusez, son avant-dernière. Au-dessus d’elle, une sorcière plonge en lançant un long cri strident et attrape Luciole entre ses dents. La sorcière ramène sa proie à la maison ce qui permet à Luciole de lire la plaque sur la porte : « Dortoir de chauve-souris ». Luciole voit ensuite au loin une grande enseigne lumineuse où est écrit le nom du Paradis qu’elle s’apprête à rejoindre : « W – A – L – M - A – R – T ». C’est à ce moment-là que Luciole a sa toute dernière pensée : « Merde, je ne baiserai pas ce soir ! »

(Source : Daily Geek Show)

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