La vitrine de jouets
Solange
s’était immobilisée devant la vitrine de jouets. Pour ma part, je m’étais assis
pour attendre patiemment que ma maîtresse ait fini son lèche-vitrine.
Qu’a-t-elle
à regarder fixement ces objets immobiles et inodores, me suis-je demandé in
petto ? Ne suis-je pas cent fois plus intéressant qu’eux ? Pourtant, tu
aimes que je saute sur ton lit le matin pour te réveiller en léchant ta joue.
Tu aimes que je te suive partout, que je t’écoute patiemment me raconter tes peines, puis que je me couche sur tes
genoux pour te réconforter.
Pourquoi
alors regardes-tu cette poupée de chiffons bleus ? Elle ne fera rien de tout ça
pour toi. Comble d’inutilité, elle ne pourra même pas marcher à tes côtés sur
le trottoir comme je sais si bien le faire !
Allez
Solange, laisse ces inutiles dans leur cage de verre et suis-moi. Je vais
t’amener à l’animalerie où tu pourras demander au vendeur une gâterie pour me
récompenser de mon bon caractère.
Comme
Solange ne bougeait toujours pas, je me suis relevé et ai commencé à tirer sur
la laisse. Le bras de Solange a suivi le mouvement, mais pas sa main qui s’est
entrouverte. La laisse est tombée sur le sol sans que ma maîtresse en ait
connaissance, tout hypnotisée qu’elle était par la dame en bleu.
Alors, j’ai commencé à m’éloigner lentement, presque sur la pointe des pattes, espérant à chaque pas entendre son rappel à l’ordre. En vain. Rendu au lampadaire, me suis-je dit, je vais me retourner et japper un bon coup. Si elle me suit, tant mieux. Sinon, elle devra demander au policier s’il a vu un petit chien blanc tacheté de brun, l’ex-fidèle compagnon de son enfance.
La vitrine de jouets. Solange Hubert, 2012 |
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