Elle
Au début,
quand j’entrais dans sa chambre, elle me souriait et m’appelait par mon nom.
Si nous
allions marcher au parc, elle se mettait à chanter des airs de son enfance.
À la salle
à manger, elle babillait comme un enfant en mangeant sa soupe.
Si la
musique jouait au salon, elle cherchait mon bras pour danser.
Puis, vint
le temps des pertes.
Quand
j’entrais dans sa chambre, elle ne me reconnaissait pas.
Quand il
faisait beau, elle préférait rester assise dans son fauteuil plutôt que de se
promener avec son déambulateur.
Quand je
lui parlais, elle fixait la fenêtre comme si je n’étais pas là.
Quand
venait le temps de manger, elle attendait que je porte la cuillère à sa bouche.
À chaque
fois que je la déshabillais, je lui enlevais des souvenirs.
À chaque
fois que je la lavais, j’effaçais des souvenirs.
À chaque
fois que je l’amenais faire quelques pas dans le corridor, je la sentais perdue
et inquiète.
À la fin,
je n’en pus plus. Je la pris et la serrai tout contre moi. Très fort, pour
qu’elle ne perde plus la mémoire.
Puis, je
l’étendis doucement sur son lit. Son visage était à nouveau calme et souriant
comme lorsqu’elle venait me tenir la main le soir pour m’aider à m’endormir.
Alors,
j’ai pris la main de ma maman et j’ai attendu en pleurant que l’on vienne
chercher son petit garçon désormais orphelin.
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